Chrysalide
Chrysalide

Chrysalide

C’était une créature d’un autre temps, un temps qui n’existait pas et qui resterait toujours. L’endroit était à la fois ancien et nouveau, et ainsi la créature qui s’y logeait. Le retour au noir. Pas moins épais, pas différent de ce dont on pouvait s’en rappeler. Le labyrinthe intérieur, qu’on n’avait jamais vu mais que l’on reconnaissait, à nos propres tâtonnements, où l’on se dirigeait malgré tout, à la texture du sol sous nos pas. Le chemin, au coeur du noir, existe, et sait où il mène. Parfois il repasse là où il était, et l’on reconnaît la texture frissonnante de ce qui n’est plus.

Il y avait longtemps. Peut-être fallait-il que les liens qui s’attachaient à tout ce qu’il y avait, dans le passé, de malsain et de dépendant fussent coupés avant de retourner à cet endroit-là.

Il y a quelqu’un qui vient de la lumière mais qui dans le noir sait regarder, et qui sait ce qui advient – et qui le montre. Les griffures des épines éveillent, elles rendent plus attentif à l’odeur de la terre fertile et tassée déjà par l’eau enfuie. Et là où l’eau s’enfuit, toujours plus loin et plus vite qu’on ne la voit faire, il resta quelque chose qui s’ancre, authentique, inaltéré. Et plus visible à mesure que la chrysalide s’arrache sans rien en entraîner avec elle. Plus fort, au point qu’on ne l’en remarque plus.

On peut bouger sans perdre ce qui est au fond de nous. Tout ce qu’il faut c’est le courage de le découvrir vraiment. De le rencontrer en personne, et non de le déduire des fouilles archéologiques de ce qu’on ramène du labyrinthe.

Il y a bien quelque chose derrière la porte de la montagne. Il y a le feu, et la lumière, et la chaleur. Mais les farfadets qui gardent le lieu ne se laisseront pas apprivoiser, pas à moins qu’on se mette à leur merci. Les yeux bandés dans leur forêt à trébucher et se rattraper sans savoir à quoi. Ils ne donneront rien qu’en retour de notre confiance, pleine et entière, sans qu’on se laisse malmener, désorienter, moquer parfois, par eux – et eux seuls. Pas question de le faire à leur place, ni de braquer sur leurs visages une lumière artificielle en espérant trouver des réponses, pas question, cette fois ni aucune des suivantes, de prévoir notre itinéraire et la suite de ses conséquences en amont.

Et, quand on s’est suffisamment dépouillé de certitudes, ils sont là : la direction de l’histoire, le lien entre les êtres, le lien entre ce qui advient, ce qui restera, et ce qui sera réparé. Et, comme une offrande, ce qui est laissé en arrière et qui reste au fond de notre caverne personnelle.

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Chrysalide

Photos : Julie of the World Tree

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