Ou ma stratégie du moment pour me motiver à avancer sur cette satanée histoire. Et me déculpabiliser parce que je ne tiens pas (encore) tout à fait bien mon rythme d’une nouvelle par mois.
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Le confessionnal numérique. C’est le mariage parfait entre le passé le plus révolu et le futur le plus hideux. L’Église en a fini d’en appeler à la générosité des fidèles pour réparer le toit de ses églises, et elle a fini par renoncer à essayer d’obtenir des fonds publics. Il n’y en a plus de toute façon.
Si séparation de l’Église et de l’Etat il doit y avoir, elle ne survivra pas à cette nouvelle fusion ; la Finance a absorbé l’État, et l’Église s’est fondue dans la Finance comme un de ces amants éconduits qui s’inscrivent au même club de sport que vous dans l’espoir de vous récupérer en vous croisant régulièrement, s’insinuant dans votre vie, dégueulassant vos journées.
On n’a plus besoin de bouger de chez soi, plus besoin d’être vu. On peut s’avancer entre les allées en toute discrétion, notre casque de VR sur la tête. On peut la lever et contempler les arches, les statues, toutes rénovées à coups de Creative Suite, tandis que nous envahit la sensation du divin, aussi authentique qu’au temps des premiers lieux saints. Enfin, je suppose, parce qu’il y a longtemps qu’on ne peut plus entrer dans une église. Ou une mosquée. Ou n’importe quel temple. Ils ont tous été transformés en salles réseau, et on peut choisir quelle église visiter pour soulager notre conscience aujourd’hui. La paix de l’âme associée à la culture, le tout le cul posé sur une chaise de gamer design et la main agrippée à un joystick à plusieurs milliers d’euros.
Mais enfin que ne ferait-on pas pour un peu de tranquillité de l’esprit ?
Ça les nouveaux prêtres l’ont bien compris. On n’étudie plus les langues mortes – tous les textes ont déjà été traduits de toute façon –, maintenant, ce sont les langues virtuelles. Les cardinaux d’aujourd’hui sont formés comme les plus grands hackers, et si l’obole est toujours de mise, elle passe désormais par Paypal, en toute discrétion.
Deux solutions : le menu déroulant des péchés les plus courants, adultères, vols, visites sur des sites en contradiction avec nos valeurs fondamentales – aussi appelées : sorties de bulle de perception –, ou entrée manuelle de nos péchés pour les cas les plus exotiques. Dans ce second cas un opérateur en ligne se tient à votre écoute, renforçant le lien social, demandant plus de détails, et vous indiquant quoi faire pour mériter l’absolution. Habituellement ça passe par quelques Ave Maria et un nombre à quantité de zéros variable.
Ça, c’est pour le fonctionnement journalier ; mais ça ne suffirait pas à justifier l’existence de la Nouvelle Église Numérique ; ni, à terme, à lui faire récupérer sa mainmise, de façon officielle, sur l’Etat.
Si un pays peut être géré comme une start-up, pourquoi pas une religion ?
Des gigabytes de données sont récupérées chaque jour sur les habitudes, les petits écarts des fidèles. Ils ne sont jamais punis, toujours encouragés. C’est ok de fauter, tant qu’on a conscience que c’était mal. Mais la vérité c’est que cette base de données n’est pas intéressante du point de vue de ce qui est interdit ou non, elle l’est du point de vue de ce qui crée de la honte.
De quoi les gens se sentent-ils coupables en 2025 ?
Et, conséquemment, quel est leur plus cher désir ?
Ou plus prosaïquement : quoi leur vendre ?
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